Il est notoire que Nintendo et Masahiro Sakurai n’apprécient pas vraiment l’approche compétitive de leur jeu phare Super Smash Bros. Mais force est de constater que cette façon de jouer à ce jeu a connu et connaît encore aujourd’hui un réel succès auprès des joueurs et de la communauté du versus fighting. On ne peut que s’en convaincre en voyant la multitude de tournois organisés sur différents opus de la licence Smash Bros, mais aussi par les jeux que cette dernière a pu inspirer chez certains.
Rivals of Aether fait partie de ces Smash-like davantage pensé comme un jeu de versus fighting et moins comme un party-game. Sorti originellement en 2017 uniquement sur Steam, le jeu développé par Dan Fornace a fait l’objet d’une nouvelle édition en septembre 2020. Baptisée Definitive Edition, elle inclut d’office les personnages initialement proposés en DLC ainsi que du nouveau contenu que l’on va détailler dans cette critique. C’est aussi l’occasion pour le jeu d’être exporté sur Switch.
Est-il un rival sérieux dans le monde des Smash-like ? Ou bien se classe-t-il dans les profondeurs de la tier list ?
Préparez vos plus beaux smashs, on entre dans l’arène pour y répondre !
Of Animals and Elements
Au-delà de la baston, Rivals of Aether propose aussi une histoire et un background à ses personnages, sur lesquels on peut d’ailleurs en apprendre davantage sur le site officiel du jeu.
Dans le mode Story du jeu, on ne se concentre toutefois que sur six d’entre eux, qui étaient ceux du roster des toutes premières versions du jeu, avant que le casting des combattants soit agrandi par la suite. Chacun des personnages est originaire d’une région du monde d’Aether, chacune étant en lien avec les éléments du feu, de l’eau, du vent et de la terre.
Il faudra dans ce mode jouer chacun de ces personnages qui combattront dans 5 niveaux entrecoupés de cut-scènes pour contextualiser le tout. Vous disposez de 5 vies pour finir tous vos combats, vos adversaires disposant d’une vie sauf pour le dernier match.
Après avoir fini vos 5 combats, une médaille vous sera décernée en fonction du temps qui vous a été nécessaire pour les finir. Vous pouvez d’ailleurs commencer par le personnage de votre choix. Une fois que vous en aurez fini avec les six personnages, un stage final se débloque et clôt ainsi l’aventure une fois celui-ci terminé.
Au travers de ce mode, Rivals of Aether fait un peu plus que de se contenter du minimum syndical. On sent que malgré la courte durée nécessaire pour finir ce mode (comptez à peine plus d’une heure), il y a un réel effort pour donner de la consistance aux personnages et à l’univers du jeu. Complots, trahisons, alliances et bien d’autres thèmes sont abordés, bien que cela soit fait en surface, si bien qu’on prend du plaisir à le parcourir, et même à y revenir pour obtenir les médailles d’or sur tous les niveaux.
Un story mode dûment complété !
Game me more !
Comme une bonne partie de jeux indés, Rivals of Aether adopte un style graphique en 2D inspiré de l’esthétique des consoles 16-bits. Pourtant, le jeu ne cède pas à la facilité en proposant une pâle copie de ce qui pouvait se faire à cette époque. Si on devine évidemment cette inspiration graphique que l’on associe aux années 90, Dan Fornace et son équipe ont su néanmoins proposer une véritable identité propre à leur jeu et capable de se distinguer d’autres productions vidéoludiques indépendantes. Même les invités Ori et Shovel Knight ont bénéficié d’un soin particulier pour qu’ils ne soient pas simplement la copie conforme de leur jeu d’origine.
Et d’un point de vue purement technique, le travail réalisé est remarquable. Les sprites et animations de chaque personnage sont magnifiques et détaillés, tout comme les arènes de combat qui regorgent de détails en arrière-plan et qui vous feraient presque oublier le combat qui se déroule sous vos yeux.
Ce travail d'orfèvre se remarque aussi par les effets visuels associés aux coups spéciaux et aux événements de match comme l’éjection d’un adversaire. Flammes, fumée, tours de pierres… Le tout se mêle parfaitement bien, même si pour certains joueurs il faudra passer davantage de temps pour s’accoutumer à cette certaine profusion d’effets visuels. De plus, ces derniers sont suffisamment bien réalisés pour faire comprendre aux joueurs l’efficacité des coups portés.
Tout le soin apporté aux graphismes apportent un véritable dynamisme et une intensité aux combats, ce qui aide clairement le joueur à se plonger dans l’ambiance du jeu.
La Definitive Edition ajoute d’ailleurs quelques ajouts graphiques mineurs, mais appréciables pour celui qui a connu le jeu depuis ses débuts. La preuve que Dan Fornace et ses collègues mettent un point d’honneur à soigner le travail graphique de leur jeu. Bref, Rivals of Aether est un régal pour les rétines, et pas seulement pour les amateurs de pixel art et de 2D.
Il semble même que cette édition corrige les rares soucis de baisse de framerate qui pouvaient surgir dans le jeu de base. Un point très positif, tant ce problème pouvait être gênant lorsqu’il survenait dans des parties même jouées en multijoueur local.
Un incendie ne vous aura jamais paru aussi beau en 2D !
L’excellent travail graphique se couple avec une bande-son qui est tout aussi somptueuse.
Les effets sonores sont réussis et aident là-aussi à s’immerger dans l’intensité des combats. Outre ceux présents pour donner une consistance aux combats, ceux des coups portés permettent, à l’instar des effets visuels, de donner des indices tangibles sur leur efficacité.
Mais c’est véritablement la musique composée par flashygoodness qui sublime la bande-son du jeu. Déjà compositeur de la très sympathique OST du jeu Tower of Heaven (dont l’un des morceaux remixé fait un retour dans le jeu), il offre à Rivals of Aether des musiques dignes de ce nom. Chaque menu, stage et cinématique est associé à une composition musicale idoine et fort bien réalisée. Les thèmes musicaux resteront longtemps dans les mémoires des amateurs de sonorités 8-bits et 16 bits, à commencer par le thème principal qui revient dans le jeu dans différents styles. Le talent de flashygoodness est indéniable et l’exploite pleinement pour l’OST de Rivals of Aether : tantôt épique, tantôt atmosphérique, tantôt enjouée, chaque musique semble parfaitement à sa place dans le jeu. Et avec la Definitive Edition, le compositeur se paie même le luxe de remixer certaines de ses musiques. A écouter sans modération !
Un aperçu du génie musical de flashygoodness
Entre DI, up-air, roll tech et autres joyeusetés
Comme expliqué plus haut, Rivals of Aether s’inspire fortement du gameplay de Super Smash Bros. Pour la minorité de personnes n’ayant aucune idée de comment peut se jouer un tel type de jeu, on peut le définir comme un jeu de combat dans des arènes en vue de côté où l’objectif est d’éjecter son ou ses adversaires hors du stage. Pour cela, des coups normaux et spéciaux permettront d’augmenter les dégâts de son ennemi, représentés par un pourcentage, pour finalement le faire valser quand il aura subi suffisamment de dommages.
Même s’il est présenté comme un jeu de combat, Super Smash Bros était plus conçu comme un party game et moins comme du versus fighting. Mais l’émergence de l’opus Melee sur la scène e-sport a clairement changé la vision que les joueurs avaient de Smash Bros. La notoriété du jeu est telle que l’on peut maintenant classer deux types de public : ceux qui y joueront “pour le fun”, et ceux qui y joueront pour la compétition.
Rivals of Aether est clairement destiné à cette deuxième catégorie de public. Ici, pas d’armes ou objets, l’affrontement se fait avec les capacités propres de chaque joueur et du personnage qu’il a choisi d’incarner. Si des événements aléatoires peuvent surgir dans les différentes arènes (par exemple, des geysers sur chaque côté du stage), il existe une option permettant de les supprimer. Cet aspect compétitif est poussé au point même d'intégrer une mécanique de "bannissement" de stages par un joueur avant une partie, ce qui est un aspect prépondérant de la stratégie dans le Smash compétitif. Il est toutefois possible de ne pas intégrer cette mécanique en local.
Mais Rivals fait également des changements conséquents dans la façon d’aborder le gameplay d’un Smash-like. On a toujours des coups normaux, des coups spéciaux, des “smashs” (coups pouvant être chargés) et des esquives. Cependant, le jeu se distingue par deux changements majeurs :
Il n'y a pas de bouclier activable par le joueur, seul un bouton d'esquive est disponible, et cette esquive ne peut pas être effectuée sur place. Toutefois, si ce bouton couplé à une direction permet d’effectuer une roulade ou un déplacement aérien, une pression sur la touche d’esquive sans direction permet d’effectuer une parade permettant, si elle est faite dans le bon timing, de non seulement parer un coup ennemi mais également de l’étourdir ;
Sauf exception un peu particulière pour Ori, il n’est pas possible de s'agripper aux plateformes ou aux rebords du stage. A la place, c’est pas un système de wall-jump qui sera possible de revenir dans l’arène.
Au-delà de ces changements, le jeu développe et affine d’autres éléments de gameplay qui sont surtout appréhendés par les joueurs compétitifs de Smash. Par exemple, le Directionnal Infuence (ou DI, c’est-à-dire la possibilité de diriger légèrement son personnage après avoir subi un coup) est bien plus manœuvrable et donc perceptible dans Rivals of Aether. En contrepartie, les esquives aériennes sont bien plus punissables par l’adversaire.
Il faut aussi relever que la vitesse de jeu est bien plus rapide dans Rivals of Aether que dans le dernier Smash Bros en date. De même que pour l’inertie qui est bien plus accentuée dans Rivals. On est en réalité assez proche de ce que pouvait avoir dans l’opus Melee, et donc de ce qui avait plu aux joueurs compétitifs de Smash à l’époque.
Les habitués de Smash, et surtout du dernier en date, comprendront vite qu’il s’agit de différences changeant assez radicalement l’expérience de jeu. Pour schématiser, il est donc bien plus difficile de défendre et de revenir sur l’arène dans Rivals. En contrepartie, le jeu offre bien plus d’options pour appréhender ses combats.
Ainsi, les premières parties dans Rivals peuvent s’avérer un brin frustrantes, surtout pour ceux qui n'ont pas vraiment joué à un jeu de type Smash. Mais le jeu reste tout de même accessible pour tous sans que l’on soit obligé de se plonger dans toutes les subtilités de gameplay du soft. A l’instar de Smash, nul besoin de connaître des combinaisons de touches particulières pour prendre du plaisir à jouer à Rivals, malgré son approche plus compétitive.
Oui, il est possible de littéralement jongler avec votre adversaire dans Rivals !
A new challenger is coming !
Le roster de personnages dans Rivals reste assez réduit si on le compare avec d’autres jeux de combat puisque vous avez en effet le choix entre 14 personnages. Mais il ne s’agit pas d’un défaut quand on voit que chaque personnage a réellement ses spécificités. Vous ne jouerez clairement pas de la même façon en fonction du personnage choisi.
Ces différences sont rendues possibles par la palette de coups qui n’a rien à voir d’un personnage à un autre, ainsi qu’à des caractéristiques de gameplay particulières comme la vitesse ou la maniabilité.
Par exemple, Zetterburn sera clairement orienté vers l’attaque, avec sa vitesse et ses coups qui peuvent très rapidement infliger de sérieux dégâts, là où Absa sera un personnage avec lequel il faudra être plus patient et essayer de tendre des pièges à l’adversaire.
Ainsi, chacun trouvera forcément un personnage qui correspond à sa façon de jouer.
Mais comme dans la majorité des jeux de combats, tous les personnages ne sont pas égaux pour autant et certains se révèlent meilleurs que d’autres.
Un très joli panel d'animaux de compagnie (Shovel Knight mis de côté bien sûr !)
Quant aux stages proposés dans le jeu, là aussi le nombre n’est pas forcément conséquent et ils pourraient apparaître assez similaires au premier abord, si on met de côté les différences purement graphiques. En réalité, la construction des stages vous obligera à aborder différemment vos combats puisque la disposition des plateformes et la taille des zones d’éjection est clairement différente d’un niveau à un autre.
Il faut noter que la Definitive Edition offre des stages et skins alternatifs pour chacun des personnages, ces derniers étant déblocables après avoir atteint un certain nombre d’éjections ou de chutes pour chacun des personnages.
Il faut également noter la présence de skins saisonniers (à l'occasion de Noël et d’Halloween notamment), ainsi que la possibilité d’acheter certains skins.
Et si malgré tout, la taille du roster et des stages reste un problème pour vous, la version Steam vous donne accès au workshop et aux multiples contributions de la communauté. Vous rêviez de faire combattre Jotaro Kujo et Kirby sur le stage Fountain of Dreams de Melee ? Avec le workshop de Rivals of Aether, ce rêve peut devenir réalité !
Bien évidemment, la qualité des personnages, stages et autres éléments varient d’un extrême à l’autre, mais les outils de filtrage du Workshop vous permettront d’avoir accès au meilleur… ou même au pire si vous le désirez !
Une édition définitivement riche
Indépendamment du monde Histoire qui a été détaillé au début de cette critique, Rivals of Aether propose un choix assez conséquent de modes de jeu.
S’agissant du local, on a évidemment le mode Versus qui permet de combattre jusqu’à 4 joueurs humains ou IA, en équipe ou en chacun pour soi, avec la possibilité de modifier certaines options comme le nombre de vie, le temps imparti, et autres. Mais contrairement à Smash Bros, rien qui ne vient réellement impacter le gameplay en lui-même, comme des personnages qui se déplacent plus vite ou sont plus grands, etc… Cela est toutefois logique lorsqu’on garde en tête que Rivals est davantage un jeu de combat qu’un party game.
Profitons de ce point sur ce mode pour souligner le niveau malheureusement faible de l’IA, surtout pour les joueurs expérimentés.
Si vous taper dessus de façon “traditionnelle” devient lassant, d’autres modes vous permettent de varier les plaisirs.
Parlons d’abord du mode Abyss qui, de prime abord, s'apparente à des affrontements successifs de vagues d’ennemis, et qui est jouable en solo ou en coopération à deux joueurs. Sauf qu’il faudra parfois s'accommoder avec des conditions particulières, comme éjecter les ennemis à des endroits précis, voire même s’attendre à ne pas du tout affronter d’ennemis. Le mode propose en effet certains défis pour entrecouper les combats, comme sauter sur des plateformes sans tomber ou se diriger vers des points de lumières pour éviter de prendre des dégâts dans la pénombre.
Une fois chaque vague finie, vous pourrez récupérer des points d’expérience afin d’augmenter le niveau de votre personnage dans ce mode et débloquer des modifications pour les coups spéciaux, utilisables dans ce mode ou même dans un mode Versus spécifique nommé l’Abyss Versus.
Un mode sympathique, mais dont on en fait rapidement le tour.
Plus intéressant est le nouveau mode Tetherball venu avec la Definitive Edition du jeu. Inspirée d’une activité connue chez nous sous le nom de spiroballe, ce mode oppose deux joueurs ou deux équipes de deux joueurs. L’objectif est ici d'enrouler une balle dans un certain sens (horaire ou antihoraire) en fonction du côté duquel on est placé pour remporter une manche. Il sera possible d’utiliser n’importe quel coup pour frapper la balle, et même de frapper vos adversaires pour les éjecter du terrain ! Interdiction par contre de frapper la balle en dehors de votre camp
En plus de proposer un mini-jeu assez inédit dans les jeux de combat, le Tetherball s’avère plus tactique qu’on pourrait le penser à première vue, et sera générateur de bien des fous rires ou de moments salés ! Et cerise sur le gâteau, ce mode est même jouable en ligne !
Plage, cocotiers et Tetherball !
S’agissant du online, et comme pour beaucoup de jeux de combats, on peut y faire des matchs classés ou non classés, ces derniers pouvant évidemment se faire contre des amis.
Pour les matchs non classés, il est possible de faire du un-contre-un (avec ou sans le Workshop), du 2-contre-2 ainsi du chacun pour soi jusqu'à 4 joueurs.
Pour le matchmaking, il est possible de choisir sa région parmi 9 différentes.
Même si cela va dépendre en partie de la connexion de chacun, l’online marche plutôt bien et on arrive sans trop de problèmes à faire ses parties entre inconnus ou amis. Il arrive parfois que le matchmaking prendre un peu de temps avant de trouver une partie, mais il n'y a généralement pas trop de problèmes de ce côté-là.
Même s’il n’est pas un véritable mode de jeu en soi, le Color Edit est une feature bien sympathique pour laisser libre cours à son âme d’artiste. Comme certains l’auront peut-être deviné, il permet de modifier les palettes de couleurs de chaque personnage. Cela n’effacera pas les skins déjà présents, mais constituera un skin supplémentaire réalisé par vos soins. A noter que l’obtention de toutes les médailles d’or dans le mode Story vous permettra de débloquer un autre slot pour un skin personnalisé.
Conclusion
Beau, nerveux, complet mais sans non plus entrer dans la surenchère de contenu, Rivals of Aether s’impose comme le Smash-like idéal pour les joueurs plus attirés par l’aspect compétitif, grâce à des mécaniques de gameplay précises et clairement pensées pour le versus fighting.
Mais les autres joueurs lassés de Brawlhalla et consorts peuvent également se laisser tenter par ce jeu de combat très solide, qui ravira les fans de graphismes 2D et de musique chiptune, ainsi que les amateurs de jeux de combat en quête de soirées en multijoueur local ou online. Même si un temps d'adaptation sera nécessaire, il serait très dommage de ne pas laisser sa chance à un tel jeu !
Everything is here !
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